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    PAYSAGE LUNAIRE DU CHOULA

cathé SUR L’EUCHARISTIE PAR UN ABBE (1)

CHAPITRE PREMIER   – LE SACRIFICE REDEMPTEUR

Jésus Sauveur du monde …

1. Pourquoi Jésus est-il appelé le «Sauveur du monde » (Jean, IV,42) ?
— Parce qu’il est venu nous tirer de la catastrophe où nous étions tombés par le péché d’Adam.

2. Quels biens Adam a-t-il perdus dans cette catastrophe?
— Pour lui et pour ses descendants il a perdu définitivement la grâce sanctifiante originelle qui le rendait ami de Dieu, et les trois privilèges qui en découlaient, à savoir la pleine domination de l’âme sur le corps (pas de maladie et de mort), de la raison sur les passions (pas de conflits passionnels), de l’homme sur la nature extérieure (pas de travail pénible).

3. Cette catastrophe a-t-elle été une tragédie?
— Oui ; c’est à elle que pense Jésus quand il pleure sur la mort de Lazare (Jean, XI,35); c’est pour la réparer qu’il supportera de mourir sur la Croix : « Comme par la désobéissance d’un seul la multitude a été constituée pécheresse, ainsi par l’obéissance d’un seul la multitude sera-t-elle constituée juste »(Rom.,V,19)

 … non par voie de simple délivrance.. . .

4. Dieu aurait-il pu pardonner du haut du ciel sans envoyer Jésus?
— Certes, Dieu pouvait pardonner de bien des manières, par exemple en oubliant l’offense du péché et donnant à nouveau la vie de la grâce.

5. Pourquoi ne l’a-t-il pas fait?
— Il y aurait eu pardon sans que la première offense faite à Dieu fût compensée. Il aurait été éternellement vrai que Dieu au total aurait reçu de sa création plus d’affront qu’elle ne lui rendrait jamais d’amour.

L’homme aurait été délivré, mais il n’aurait pas été racheté, car la rédemption suppose une compensation proportionnée. (Saint Thomas, III Sent., dist. 20, qu. 1, a. 4, quaest. 1, ad 1).

… mais par voie de compensation on rédemption …

6. Comment s’est opéré notre pardon?

L’homme ayant offensé Dieu, le Fils de Dieu demande en quelque sorte au Père la per¬mission de descendre sur la terre en se faisant homme ; alors il pourra faire monter vers le Ciel un acte de compensation qui, venant d’une Per¬sonne divine, sera d’une valeur infinie et con¬trebalancera avec surabondance l’outrage non seulement du péché d’Adam mais de tous les péchés des hommes.
« Par son amour et son obéissance en la souf¬france, le Christ a donné plus à Dieu que ne l’exigeait la compensation de l’offense de tout le genre humain » (Saint Thomas, III, qu. 48, a. 2).

7. Devait-il y avoir renoncement, et par conséquent souffrance, pour que la compensation donnée par Jésus fût parfaite ?

— Oui : en Adam, l’humanité renonce à Dieu pour l’amour du monde ; en Jésus, par un mouvement contraire, l’humanité renonce au monde pour l’amour de Dieu.

8. La moindre peine de Jésus n’avait-elle pas une valeur rédemptrice infinie ? Pourquoi dès lors est-il allé au-devant de souffrances si terribles?

— A cela, il n’y a pas d’autre réponse que son amour. Il a voulu épouser l’humanité au point le plus bas de sa détresse et de sa tragédie.
Il a pris sur lui nos agonies ; il n’est pas venu les éliminer, mais les illuminer.

A la question posée, Angèle de Foligno entend Jésus lui répondre : « Ce n’est pas de loin que je t’ai touchée. Ce n’est pas par simulation que je t’ai servie. Ce n’est pas pour rire que je t’ai aimée ».

Jésus, dit l’Epître aux Hébreux, « a été éprouvé en tout, conformément à sa ressem¬blance avec nous, à l’exception du péché »
Dieu, écrit saint Paul, « prouve son amour pour nous en ce que, lorsque nous étions encore pécheurs, le Christ est mort pour nous »(Rom., V, 8).

Jésus lui-même avait dit : « Il n’est pas de plus grand amour que de donner sa vie pour ses amis »(Jean. XV, 13).

C’est devant l’abîme de l’agonie de Jésus que nous commençons à deviner ce qu’est l’amour de Dieu pour nous.

… et de libre sacrifice d’amour

9. En quel sens profond la mort de Jésus a-t-elle été libre ? (Cf. saint Thomas, Comment. sur Jean, X, 17-18).

— Parce qu’il était Dieu et homme, Jésus pouvait à volonté séparer ou réunir son corps et son âme, librement mourir ou librement res¬susciter.
« Si le Père m’aime, dit-il, c’est que je donne ma vie pour la reprendre. On ne me l’ôte pas, je la donne de moi-même. J’ai pouvoir de la donner et pouvoir de la reprendre : tel est l’or¬dre que j’ai reçu du Père ».(Jean, X, 17-18).

Ainsi a-t-il pu changer l’atroce mort de la Croix en le plus pur et le plus beau sacrifice d’amour.

10. La mort de Jésus en Croix a-t-elle été un acte cultuel de sacrifice, ou un acte théologal de charité?

— Elle a joint les deux aspects : elle a été un acte extérieur de sacrifice enveloppant un acte intérieur d’amour ; ou un acte intérieur d’amour enveloppé dans un acte extérieur de sacrifice.

11. Ces deux aspects sont-ils révélés dans l’Ecriture ?

L’Ecriture voit dans la mort de Jésus : d’une part le sacrifice suprême : « Il s’est livré lui-même pour nous en offrande et sacrificeà Dieu » (Ephés., V, 2). « Ayant offert pour les péchés un unique sacrifice, il s’est assis pour toujours à la droite de Dieu » “. Jésus entre dans le monde pour remplacer par son unique sacrifice sanglant
tous les sacrifices impuissants de la loi ancienne (Ephés., V, 2.).

d’autre part le suprême acte d’amour : « Jésus, sachant que son heure était venue de pas¬ser de ce monde au Père, ayant aimé les siens qui étaient dans le monde, il les aima jusqu’à la fin », jusqu’à la fin de l’amour’. « Voici à quoi nous avons connu l’Amour : il a offert sa vie pour nous » (I Jean, III, 16.)

Ampleur et valeur du sacrifice rédempteur

12. Les quatre fins des sacrifices de la loi ancienne, à savoir l’adoration, l’action de grâces, la supplication, l’expiation, se retrouvent-t-elles dans le sacrifice de la Croix ?
— Elles s’y trouvent portées à un degré inouï.

Le sacrifice de Jésus en Croix fait monter vers Dieu une adoration, une action de grâces, une supplication, une expiation dont la valeur est infinie ; à elles désormais devront, au moins obscurément, se suspendre, pour être valables devant Dieu, l’adoration, l’action de grâces, la supplication, l’expiation de tout le genre humain.

13. Pourquoi parle-t-on surtout de la rédemption de la Croix ?

— C’est parce que le sacrifice de la Croix, auquel est suspendu le salut de tout le genre humain, a été provoqué par la catastrophe originelle et qu’il est venu compenser l’offense du premier péché.

Jésus nous apporte « la rédemption par son sang » (Ephès., I, 7.). Il est l’Agneau immolé qui a racheté pour Dieu par son sang tous les hommes (Apoc., V, 6 et 9 ; I Pierre, I, 18.)

Le monde de la rédemption meilleur au total que celui de l’innocence

14. Y a-t-il un acte d’amour plus grand que celui de Dieu créant le monde dans la justice originelle?

— Oui, c’est celui de Dieu rassemblant le monde pécheur sous le sacrifice rédempteur.
« Nous avons été réconciliés avec Dieu par la mort de son Fils » (Rom., V. 10.). Dieu a réconcilié par lui toutes choses « en faisant la paix par le sang de sa Croix ».

15. Le inonde de la rédemption est-il au total meilleur que le monde de l’innocence?

— Oui, malgré la part terrible laissée au mal, le monde de la rédemption, groupé autour du Christ, est meilleur au total que le monde de l’innocence groupé autour du seul premier Adam.

Le sang de la rédemption, dira saint Fran-çois de Sales, vaut cent fois mieux que les neiges de l’innocence.
L’heure de Jésus est celle où il tire à lui les hommes de tous les temps(Col., I, 20.)

16. Comment Jésus appelle-t-il le moment su-prême où. Dieu par lui se réconcilie le monde ?

— Il l’appelle « son Heure » (Jean, II, 4 ; VII, 30 ; XII, 23, 27 ;(Jean, II, 4 ; VII, 30 ; XII, 23, 27 ; XIII, 1 ; XVII, 1.), 1 ; XVII, 1.) parce que sa vie entière est comme un acte total unique qui trouve son accomplissement dans sa Passion, où il nous tire après lui jusque dans sa Résurrection et son Ascension.

17. Le sacrifice du Christ s’étend-il à tous les hommes du, passé et de l’avenir ?

— Oui, la Croix étend ses bras sur le passé et sur l’avenir.

Elle sauve par anticipation les âges qui ont précédé : les grâces divines étaient données en considération du futur sacrifice de la Croix ; et par dérivation les âges qui ont suivi : les grâces divines sont données à travers le sacrifice de la Croix.

« Et moi, quand j’aurai été élevé de terre, je tirerai tous les hommes à moi » (Jean XIII,32)


CHAPITRE II   SACRIFICE NON SANGLANT DE LA CENE

L’unique moment du sacrifice sanglant

1. Pourquoi le sacrifice sanglant de la Croix devait-il être unique ?

— Parce que, sa valeur étant infinie, il suf¬fisait à racheter pour Dieu en un moment les hommes de tous les temps.
« Par une oblation unique, le Christ a rendu parfaits pour toujours ceux qu’il sanctifie » (Hébr., X, 14.)

2. Quand commence et finit le moment du sacri¬fice de la Croix?

— Il est déjà commencé quand Jésus institue la Cène, « la nuit où il fut livré »  (I Cor., XI, 23.)

Il s’achève sur la Croix où « tout est consommé » (Jean, XIX, 30).

Notre participation au sacrifice même de la Croix

3. Les hommes sont-ils appelés à s’unir au sa¬crifice par lequel ils sont rachetés ?

— Oui; non certes pour en accroître l’inten¬sité, qui est infinie, mais pour y consentir, et se laisser envahir par sa lumière.

4. Quel consentement minimum au sacrifice de la Croix est-il requis de tous les hommes ?

Pour le moins, il est requis que tous les hommes s’ouvrent aux prévenances secrètes de la grâce divine. Car la grâce vient de la Croix de Jésus, et elle attire mystérieusement à la Croix de Jésus ceux qui ne lui résistent pas:

5. Quel consentement plénier au sacrifice de la Croix est-il attendu des chrétiens ?

— Il leur est demandé d’entrer dans le sacri¬fice de Jésus assez profondément pour être non seulement sauvés par Lui, mais brûlés par son désir même de sauver le monde.

La raison de la présence sacramentelle

6. Comment s’unissait-on jadis aux sacrifices _qu’on offrait à Dieu ?

— On s’y unissait non seulement par la pen¬sée mais encore par la manducation de la victime pour signifier qu’on s’offrait avec elle.
« Ceux qui mangent les victimes ne sont-ils pas en communion avec l’autel ? »  (I Cor., X, 18.)

7. Que fera Jésus pour que les apôtres puissent s’unir ainsi à son sacrifice sanglant ?

— Pour que les apôtres puissent, à la Cène, s’unir à son sacrifice sanglant non seulement par la foi et l’amour, mais encore par la manducation de la victime, Jésus va se rendre mystérieuse¬ment présent sous les apparences du pain et du vin, et se donner à eux en nourriture.

8. Que veut Jésus par cette communion des apôtres ?

— Jésus veut être mangé par les apôtres au temps même de son grand désir de sauver le monde par son sacrifice (Luc, XXII, 5.) au temps même où il est consumé par le feu qu’il vient jeter sur la terre (Luc XII,49). Car qui mange un désir est mangé par ce désir ; qui mange du feu est mangé par le feu.

La Cène présence non sanglante du sacrifice sanglant

9. La présence mystérieuse de Jésus sous les apparences du pain et du vin est-elle à la Cène un sacrifice vrai et propre ?

— Oui, puisque c’est le sacrifice sanglant lui- même, déjà commencé, qui est contenu sous les apparences non sanglantes du pain et du vin.

10. Le sacrifice de la Cène est-il différent de celui de la Croix ?

— Non, il est l’enveloppe non sanglante du sacrifice de la Croix.

Il n’y a pas à la Cène deux sacrifices distincts mais deux présences distinctes de l’unique sacri¬fice rédempteur : l’une évidente ou naturelle, qui est sanglante ; l’autre mystérieuse ou sacramen¬telle, qui est non sanglante.

Le sang de la Croix qui nous acquiert une rédemption éternelle (Hébr., VIII, 12.) est celui même qui remplit la coupe de la nouvelle Alliance.(Luc, XXII, 20).

Pâque juive et Pâque chrétienne

11. La coïncidence de la fête juive de la Pâque• et de la Cène est-elle fortuite ?

–Non, elle signifie que la Pâque juive devait s’effacer devant une Pâque plus mystérieuse qu’elle préfigurait.

12. Qu’était la Pâque juive ?

La Pâque juive était l’offrande sacrifi¬cielle d’un agneau, à laquelle on s’unissait par la manducation, en reconnaissance de la bonté de Dieu délivrant son peuple de la captivité d’Egyp¬te pour le faire entrer dans la Terre promise.

13. Que préfigurait la Pâque juive ?

— Elle préfigurait l’offrande sacrificielle du Christ, Agneau immaculé (I Pierre, I, 19.) à laquelle on s’unit par la communion, et par laquelle l’humanité est délivrée du péché et introduite dans la paix de Dieu.

Après avoir célébré la Pâque ancienne, dit le concile de Trente, le Christ institua la Pâque nouvelle « en mémoire de son passage de ce mon¬de au Père, lorsqu’il nous racheta par l’effusion de son sang, nous arracha à la puissance des té¬nèbres, et nous transféra dans son royaume » i(Denz. no 938. ” Lue, XXII, 15)..

14. La correspondance de la Pâque juive et de la Cène, est-elle marquée dans I’ Ecriture ?

— Le soir venu, Jésus dit à ses disciples : « J’ai désiré d’un grand désir manger cette Pâque avec vous avant de souffrir » “(Luc, XXII, 15.)

Et saint Paul exhorte les Corinthiens à se purifier du péché à l’approche des fêtes de Pâques, « car le Christ, notre Pâque, a été immolé ” (I Cor., V, 7.)».

La réitération du sacrifice non sanglant

15. Le sacrificenon sanglant de de la Cène est-il réitérable?

— S’il a pour fin de nous permettre de com¬munier à l’unique sacrifice rédempteur, en mul¬tipliant ses présences, le sacrifice non sanglant de la Cène devra pouvoir se réitérer.

16. Jésus a-t-il voulu qu’il fût réitéré ?

— Il l’a demandé expressément : « Et ayant pris du pain et rendu grâces, il le rompit et le leur donna, en disant : — Ceci est mon corps donné pour vous ; faites ceci en mémoire de moi » “. « Cette coupe est la nouvelle Alliance en mon sang ; faites ceci en mémoire de moi toutes les fois que vous en boirez »(Luc, XXII, 19.)

Doctrine du concile de Trente sur le sacrifice non sanglant

17. Quelle est la doctrine du concile de Trente sur le sacrifice non sanglant ?

— « Bien qu’il dût s’offrir une seule fois, lui- même, sur l’autel de la Croix par la mort », le Christ, pendant la dernière Cène, « offrit, à Dieu son Père, son corps et son sang sous les espèces du pain et du vin », en vue de laisser à l’Eglise son Epouse « un sacrifice visible, propre à représenter le sacrifice sanglant qui allait s’accomplir une fois pour toutes sur la Croix, et à en perpétuer la mémoire jusqu’à la fin des siècles, ainsi qu’à en appliquer la vertu salutaire à la rémission des péchés que nous commettons chaque jour » (Denz., N°938)-.

Le concile parle : 1. d’une offrande sur la Croix, qui est unique ; 2. d’une offrande sous les espèces du pain et du vin, qui est réitérable.

Il précise que la seconde offrande a pour fin de représenter, de perpétuer, d’appliquer la première.


CHAPITRE III   LE SACRIFICE NON SANGLANT DE LA MESSE

L’intercession du Christ au ciel

1. Le Christ monté au ciel au jour de l’Ascen¬sion, intercède-t-il encore pour nous?

— Tant que dure le monde, le Christ, tou¬jours vivant, continue d’intercéder pour nous,(Hébr., VII, 25)d’être notre avocat auprès du Père.(I Jean, II, 1-2.)

2. Intercède-t-il en réitérant sa Passion et sa mort ?

Non, l’oblation rédemptrice, étant parfaite, ne peut être qu’unique (Hébr., X, 14). Le Christ ressuscité des morts ne meurt plus, la mort n’a plus de pouvoir sur lui »

3. En quoi, dès lors, consiste désormais son intercession ?

— L’intercession céleste du Christ consiste à présenter au Père l’acte sacrificiel rédempteur unique par lequel il a en un coup sauvé le monde.

Le sacrifice rédempteur est valable pour tous les temps

4. Le sacrifice rédempteur est-il dans le temps, ou au-dessus du temps ?

— Il est un moment, le moment suprême de la vie terrestre du Christ : sous cet aspect il est dans le temps.

Il est touché et habité par l’éternité divine : sous cet aspect il est au-dessus du temps pour sauver tous les temps.

5. Est-il valable de la même manière pour les temps qui l’ont précédé et pour les temps qui l’ont suivi ?

— Avant le Christ, les grâces étaient données à cause de la supplication qu’il ferait sur la Croix, et donc par anticipation.

Après le Christ, les grâces sont données en outre en passant par la Croix, et donc par contact et dérivation.

Contact et dérivation jusqu’à nous du sacrifice rédempteur

6. Le sacrifice rédempteur est-il achevé ou inachevé ?

— Il est achevé du côté du Sauveur, Tête et Chef de l’Eglise, qui est son Corps mystique.

7. Ce sacrifice pouvait-il précontenir en lui l’avenir du monde ?

— Le Christ en Croix embrassait dans son regard toute la suite du temps.

Il pouvait dès lors nous unir d’avance à son offrande sacrificielle et attirer d’avance sur nous, pour le moment où nous viendrions à l’existence, les bienfaits de sa grâce rédemptrice.

A chacun de nous Jésus peut dire : « Je pen¬sais à toi dans mon agonie, j’ai versé telles gouttes de sang pour toi ».

8. En quel sens peut-on dire que le sacrifice rédempteur est inachevé ?

— Il est inachevé du côté des hommes tant qu’il en reste encore à incorporer aux souffrances et à la mort du Sauveur, leur Chef.

9. Comment cette incorporation des hommes au sacrifice rédempteur doit-elle se faire ?

— Du côté du Christ en Croix, nous l’avons dit, le contact de sa vertu pouvait atteindre tous les lieux et tous les temps.

Du côté des hommes, leur incorporation au sacrifice rédempteur doit se faire : 1° par la foi et l’amour, ou spirituellement, comme la Vierge et saint Jean au pied de la Croix ; 2′ par la manducation, ou sacramentellement, comme les dis¬ciples à la Cène.

Le renouvellement du sacrifice non sanglant…

10. Une union au sacrifice rédempteur comme celle des apôtres à la Cène est-elle aujourd’hui possible ?

C’est pour la rendre possible que Jésus, la nuit où il fut livré, ayant pris du pain et l’ayant rompu en disant : « Ceci est mon corps pour vous », ajouta : Faites ceci en mémoire de moi » ; et qu’ayant pris ensuite la coupe en disant :

Cette coupe est la nouvelle Alliance en mon sang », il ajouta : « Faites ceci, chaque fois que vous en buvez, en mémoire de moi ».(I Cor., XI, 23-25).

11. Que se passe-t-il donc à la Messe quand le prêtre, ayant pris du pain et du vin, redit les paroles mêmes de Jésus ?

— Le Christ lui-même, maintenant dans la gloire du ciel, se rend en outre présent mysté¬rieusement et sacramentellement sous les appa¬rences empruntées du pain et du vin, renouve¬lant ainsi le sacrifice non sanglant de la Cène.

… multiplie non l’unique sacrifice rédempteur mais ses présences au milieu de nous

12. Que vient faire le Christ en se rendant ainsi présent à la Messe ?

— Il vient, non pour rien ajouter à l’unique sacrifice rédempteur, mais : 1° pour nous le représenter, car les apparences du pain et du vin séparées nous rappellent sa mort en Croix ; 2° pour nous en appliquer la vertu salutaire.

13. Que veut dire : « la vertu du sacrifice ré¬dempteur nous est appliquée » 

— Cela veut dire que la vertu du drame san¬glant de la Croix vient alors nous toucher, pour nous faire entrer en contact avec lui et nous incorporer à lui.

14. Que se passe-t-il quand la Messe est célébrée ?

— « Chaque fois que la commémoraison de cette offrande est célébrée, l’oeuvre de notre rédemption s’accomplit » 

« O salutaire offrande, qui ouvres les portes du ciel… »

15. Le sacrifice non sanglant de la Messe déroge- t-il au sacrifice de la Croix ?

− Impossible. C’est le même Christ qui s’offre et qui est offert : d’une part à la Croix d’une manière sanglante, pour accomplir le sa¬crifice rédempteur ; d’autre part à la Cène et à la Messe, sous le rite non sanglant qui enve¬loppe le sacrifice rédempteur lui-même, l’appli¬que et permet qu’on s’y unisse sacramentelle- ment par manducation de la victime.

16. Est-ce ici la doctrine des Pères grecs et latins ?

« Nous offrons maintenant encore ce même sacrifice offert jadis et qui ne peut être détruit. Nous n’offrons pas un autre sacrifice, mais toujours le même ; ou plutôt c’est une commémoraison du sacrifice que nous faisons » (S. Jean Chrysostome, vers 391)

« Si chaque fois que son sang est répandu il est répandu pour la rémission des péchés, je dois le recevoir toujours, pour que toujours me soient remis mes péchés. Péchant sans cesse, j’ai sans cesse besoin du remède ».(S. Ambroise, vers 387)

Est-ce le Christ glorieux ou le Christ souffrant qui nous touche à la Messe ?

17. Est-ce le Christ glorieux ou le Christ souf¬frant qui se rend présent à la Messe ?

— C’est le Christ ressuscité et glorieux qui se rend présent à nous à la Messe.

Mais il interpose entre lui et nous sa Croix sanglante.

C’est par sa Croix qu’il veut, aujourd’hui comme jadis, descendre à nous et par sa Croix qu’il veut nous attirer à lui.

La Croix demeure pendant que tourne la terre : Stat Crux dum volvitur orbis.

18. N’est-il pas possible de nous unir immédia¬tement au Christ ressuscité ?

— C’est notre désir, avoue saint Paul, de revêtir la gloire céleste par-dessus notre corps sans passer par la mort (II Cor., V, 4).  Mais tant que nous sommes ici-bas, le Christ ressuscité nous dit, comme à Marie de Magdala : « Ne me touche pas, car je ne suis pas encore monté vers le Père»(Jean, XX, 17)

Plus tard, le Christ ressuscité touchera nos âmes, et à la fin du monde nos corps, pour les glorifier.

La prophétie de Malachie

19. Le sacrifice de la Messe institué par Jésus, a-t-il été prédit dès l’Ancien Testament ?

— Les Pères de l’Eglise, dès saint Justin et saint Irénée, et après eux le concile de Trente, ont vu, un pressentiment du sacrifice de la Messedans le passage où le prophète Malachie oppose aux sacrifices offerts au temple de Jérusalem un sacrifice parfait offert par tous les peuples : « Je n’ai point en vous mon bon plaisir, dit Iahvé des armées ; un présent ne me plaît pas venant de vos mains. Car du lever du soleil à son coucher, mon Nom est grand parmi les Gentils ; et en tous lieux un sacrifice d’encens est offert en mon Nom et une offrande pure ; car mon Nom est grand parmi les Gentils »( I, 10-11).

Définition de la Messe

20. Comment définir la Messe?

— La Messe est la présence au milieu de nous du sacrifice de la Croix par la répétition du rite non sanglant de la Cène.

CHAPITRE IV   L’OFFRANDE DE LA MESSE

Qui offre la Messe?

I. Faut-il séparer le sacrifice du Christ et le sacrifice de l’Eglise?

— Ni à la Croix, ni à la Cène, ni à la Messe, il ne faut séparer le sacrifice du Christ du sacrifice de l’Eglise.

Dans les trois cas, il y a sacrifice du Christ assumant l’Eglise et sacrifice de l’Eglise assumée par le Christ.

II n’y a pas juxtaposition mais compénétration des deux sacrifices : l’un qui porte, l’autre qui est porté.

2. Comment l’Eglise participe-t-elle au sacrifice sanglant de la Croix ?

— Le sacrifice de la Croix, avons-nous dit, est un acte d’amour enveloppé clans un acte cultuel ou liturgique.

Dans la ligne cultuelle, le Christ agit seul sur la Croix pour substituer aux sacrifices de la loi ancienne son propre sacrifice rédempteur.

Dans la ligne de l’amour, il attire à lui, l’ayant pénétrée de sa charité, l’offrande de la Vierge et de saint Jean, et ultérieurement de tous les fidèles. Toute l’Eglise entre ainsi par l’amour dans la Passion rédemptrice du Sauveur.

3. Comment l’Eglise participe-t-elle au sacrifice non sanglant de la Cène ?

— Dans la ligne cultuelle, Jésus agit seul à la Cène pour envelopper son sacrifice sanglant sous les apparences du pain et du vin. Les disci¬ples s’uniront à lui par la communion sacramentelle.

Dans la ligne de l’amour, il invite les disciples à s’unir à son ardent désir de sauver le monde.

4. Comment l’Eglise participe-t-elle au sacri¬fice non sanglant de la Messe ?

— Dans la ligne cultuelle ou de la validité, Jésus utilise le ministère des prêtres pour se rendre présent sous les apparences du pain et du vin ; et il donne aux fidèles par le caractère baptismal de pouvoir s’unir aux prêtres, non certes pour consacrer le pain et le vin, mais.après la consécration, pour offrir à Dieu son Corps et son Sang présents sur l’autel.

Dans la ligne de l’amour, ce qui importe uni¬quement à la Messe est l’intensité de notre fer¬veur. Les derniers en dignité peuvent être les premiers à entrer par la charité dans le mystère bouleversant de la rédemption du monde.

5. L’Eglise du ciel participe-t-elle au sacrifice de la Messe?

— Les anges et les élus s’unissent à la plus solennelle des prières qui monte de la terre vers le ciel, pour demander que nos coeurs s’ouvrent pleinement à sa valeur d’adoration, d’action de grâces, de supplication, d’expiation.

Ce qui est offert à la Messe

6. Y a-t-il plusieurs offrandes à la Messe?

— Il semble qu’il y en ait plusieurs : celle du pain et du vin, celle du Christ lui-même, celle de son Eglise.

Mais cela ne fait en réalité qu’une seule offrande : car le pain et le vin ne sont offerts qu’en vue d’être changés au corps et au sang du Christ, autour duquel se rassemble l’Eglise et tout ce qui sera sauvé dans le monde : Dieu s’est plu, dit saint Paul, « à réconcilier par le Christ toutes choses, sur terre et dans les cieux, en faisant la paix par le sang de sa croix »(Col., I, 20).

7. Quand se fait l’offrande du pain et du vin?

— Au moment de l’Offertoire, et dans le Te igitur par lequel débute le Canon de la Messe : « Père très clément… nous vous deman¬dons par Jésus-Christ votre Fils, notre Seigneur, d’accepter et de bénir ces dons, ces présents, ces offrandes saintes et sans tache ».

8. Quand le Christ s’offre-t-il lui-même?

— Au moment précis de la Consécration, où le prêtre, ministre non plus de l’Eglise mais im¬médiatement du Christ, emprunte ses propres paroles. Voici le texte de la Consécration où se trouvent ces paroles : « La veille de sa Passion, il prit du pain dans ses mains saintes et vénérables, et les yeux levés au ciel (Lors de la première multiplication des pains, qui prépare l’annonce de l’Eucharistie, Jésus « ayant pris les cinq pains et les deux poissons, et ayant levé les yeux vers le ciel, les bénit…. (Marc, VI, 41)) vous, Dieu, son Père tout-puissant, vous rendant grâces, il le bénit, le rompit et le donna à ses disciples en disant : — Prenez et mangez-en tous, car ceci est mon corps. De même après le souper, il prit ce précieux calice dans ses mains saintes et vénéra¬bles, vous rendit grâces encore, le bénit et le don¬na à ses disciples en disant : Buvez-en tous, car ceci est le calice de mon sang, le sang de la nouvelle et éternelle alliance — le mystère de la foi — qui sera versé pour vous et pour la multi¬tude, en rémission des péchés. Toutes les fois que vous ferez cela, vous le ferez en mémoire de moi ».

9. Que signifient ces mots : « Le mystère de la foi » ?

— Le mystère central de notre foi, que Jésus appelle « la nouvelle alliance en son sang » a, est celui de la rédemption du monde par le sacrifice sanglant de la Croix.
« Quand je serai élevé de terre, dit Jésus, je tirerai tous les hommes à moi. Il signifiait par là, continue l’Evangéliste, de quelle mort il allait mourir » 
3 I Cor., XI, 25.(Jean, XIII, 32-33. On peut dire aussi que l’Eucharistie est un « mystère de foi » parce qu’autre chose est ce qu’on voit).4 Jean, XIII, 32-33. On peut dire aussi que l’Eucharistie est un « mystère de foi » parce qu’autre chose est ce qu’on voit(les apparences du pain et du vin), autre chose ce qu’on croit (le corps et le sang du Christ). C’est en ce sens qu’Innocent III interprète les mots : mysteriunz Denz., no 414).

10. L’Eglise s’offre-t-elle elle-même à la Messe?

« L’Eglise, Corps dont le Christ est la Tête, apprend à s’offrir elle-même par lui » .(S. Augustin).« I1 sort du corps naturel de notre Sauveur une impression d’unité pour assembler et réduire en un tout le Corps mystique ; et on accomplit le mystère du corps de Jésus-Christ quand on unit tous ses membres pour s’offrir en lui et avec lui. Ainsi l’Eglise fait elle-même une partie de son sacrifice »(Bossuet).

Participation finie de l’Eglise à la valeur infinie de la Messe

11. La valeur de la Messe est-elle finie ou infinie ?

— Il faut parler de la Messe comme on parle de la Croix : sa valeur est infinie, mais elle n’est participée par l’Eglise que d’une manière finie, selon l’intensité plus ou moins grande de son amour à chaque moment de son pèlerinage dans le temps.

Pour qui la Messe est-elle offerte,ou quels sont les fruits de la Messe ?

12. En participant elle-même au sacrifice rédempteur, l’Eglise peut-elle en outre supplier pour le monde ?

— Oui, et ce qu’elle obtient ainsi par sa supplication retombe en bénédiction sur le mon¬de : voilà ce qu’on appelle les fruits de la Messe.

13. A quelles intentions se fait cette supplication ?

— On distinguera dans chaque messe :

1° l’intention de l’Eglise elle-même qui prie pour tous les fidèles vivants et morts et pour le salut du monde entier : voilà le fruit général de la Messe ;
2° l’intention du prêtre en tant que minis-tre de l’Eglise (A la consécration, le prêtre est ministre du Christ ; pour l’accomplissement de l’office liturgique, il est ministre de 1’Eglise). voilà le fruit spécial ;

3° l’intention personnelle, soit du prêtre soit des fidèles : voilà les fruits particuliers.

14. Où l’ « intention universelle » de l’Eglise est- elle formulée?

— Par exemple à l’offrande du calice : « Nous vous offrons, Seigneur, le calice du salut et supplions votre clémence qu’il s’élève, tel un parfum pénétrant, devant la face de votre divine Majesté, pour notre salut et celui du monde entier ».

15. Qu’appelle-t-on : « intention spéciale » du prêtre en tant que ministre de l’Eglise ?

— Ce que l’Eglise a puisé par l’intensité de son amour dans les profondeurs infinies de la Messe, elle peut en attribuer une part au prêtre, en tant précisément qu’il est son minis¬tre, lui laissant la liberté de l’appliquer à ceux qui le lui demandent ou lui font une aumône à cette occasion. L’Eglise elle-même prend en charge cette intention spéciale du prêtre.

16. Qu’appelle-t-on : « intention particulière » du prêtre ou des fidèles?

— La dévotion personnelle du prêtre ou des fidèles qui s’unissent par la foi ou par la communion sacramentelle au sacrifice de la Messe, constitue une troisième manière de participer à sa vertu infinie.   (. . . )


EXTRAITS tirés du “Petit cathéchisme sur la messe” de l’abbé Charles Journet, avant qu’il ne devienne cardinal – éditions St-Augustin – Saint-Maurice – Suisse – 1960

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