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LES CHINOIS ? par P. WIEGER SJ

« Contre les lettrés, donc contre les Chinois de la classe dirigeante, voici les reproches que formule, de son côté, le P. Wieger, jésuite français et sinologue réputé, dans l’épilogue qu’il a mis à son Histoire des croyances religieuses et des opinions philosophiques en Chine ouvrage par ailleurs si plein de renseignements précieux:

 » 1° Du côté de l’intelligence, ce sont des blasés : «Radicale incrédulité à l’endroit de tout le surnaturel, tel est le mal foncier de l’intelligence chez la plupart des lettrés» « Ils ont entendu parler de tout, ils n’ont rien voulu croire. » « Un organe essentiel de la vie psychologique est atrophié, celui qui change les pensées en action. Après avoir bien pensé,. disent-il, hia t’an-si, on soupire bêtement et on en reste là. »

« 2° Du côté de la volonté : celle-ci est gâtée par la voie moyenne de Confucius. Voici ce que dît cette voie : Pas de sympathie, pas d’antipathie, pas d’idée préconçue, pas de conviction ferme, pas de volonté tenace, pas de moi personnel… D’abord, à première vue, ne pas approuver, ne pas désapprouver, ne pas embrasser, ne pas
repousser… Ensuite, après réflexion, ne jamais se déterminer pour un extrême, car excès et déficit sont également mauvais. Suivre toujours la voie moyenne, prendre une position moyenne.

« Par suite, en Chine, rien de ce que nous appelons avoir des principes, avoir un plan, suivre une ligne de conduite. Absence, et même inintelligence de ces idées hautes et saintes, qui ont fait les grandes nations.idéal, religion, patrie, abnégation, générosité, dévouement. II n’y a pas de mots pour ces choses, pas la langue chinoise et il n’y a pas de place pour elles dans les coeurs chinois qui ne renient pas Ia voie moyenne».

Le troisième vice de la caste, « c’est la terrible passion que j’appellerai …  de l’aléa »-_ En Chine, toute la vie nationale et la vie de chaque particulier- est une partie de CieL Toute entreprise politique, financière, commerciale plaît d’autant plus qu’elle se présente comme une aventure à courir.. On virera de bord aussi souvent qu’il sera expédient_ Si l’on s’en tire, à force de zigzags et de palinodies, on y gagnera le renom d’habile homme. Si l’on perd la partie, on se sera du moins bien amusé et l’on en recommencera une autre— Toute l’histoire nationale de la Chine, depuis l’origine jusqu’en 1917 (date de la première édition. de cet ouvrage), tient dans ce paragraphe.

Sauf de rares exceptions, l’histoire des particuliers de ce peuple immense tient malheureusement aussi_
a Religion, politique, éducation, essais divers de civilisation et de progrès, tout échoue, du fait que le Chinois le mieux fermé, le sujet sur lequel on comptait le plus, éprouvera un beau jour le besoin incoercible de tenter un coup de dés »

« Le quatrième vice national, vice de la sensibilité, est hélas! plus vil que les précédents. C’est la passion irrésistible de la jouissance, sous ses deux pires formes, la gourmandise et la luxure. Aliments, boisson, alcool, opium, morphine, héroïne, cocaïne, tabacs fins, …  aphrodisiaques de toutes sorte,,,, toniques et stimulants, pratiques innommables, j’aurais beaucoup à dire sur ces sujets, mais je ferai mieux de me taire. Pour les lettrés, la sodomie n’est pas un péché, mais la fleur de l’amitié! En un mot, hédonisme effréné Quant à l’ouvrier chinois, s’il travaille, « quand il lui plaît », c’est qu’il est soutenu par la « perspective de pouvoir noter et jouer tout son sacral, pour un temps »

A ces quatre tares des lettrés, ajoutez la haine irréductible du christianisme, parce que cette religion est un idéalisme, une innovation.

Et voici la conclusion générale du  P. Wieger : « Relisez la parabole du Semeur, et jugez quelle chance peut avoir le grain évangélique de germer, grandir et fructifier, en pareil terrain. Il serait donc inepte et injuste d’accuser les missionnaires de Chine de n’avoir pas- converti la classe dirigeante (c’est-à-dire les lettrés, la Chine n’ayant pas d’autre aristocratie), pour ne s’y être pas pris comme il aurait fallu_ Prise en masse, la classe lettrée est inconvertissable, à cause de ses vices honteux, de sa morgue stupide, et de son indifférence blasée_ Comment faire entrer dans le bercail ceux à qui s’adresse le lotis de l’Apocalypse»
Parole très grave dans la bouche d’un apôtre ».

Extrait tiré de « Le père Lebbe – Apôtre de la Chine Moderne (1877-1940) »  Léopold Lévaux – Editions Universitaires Bruxelles – Paris 1948

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