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N’ALLEZ PAS AU THIBET

Les interminables polémiques provoquées par les frasques parlementaires et autres d’un magistrat cantonal dont la présence à la Planta est de plus en plus indésirable, polémiques qui persistent à travers la fraiche canicule de l’année 1931 sans la réchauffer, hélas, ont fait perdre de vue à la presse d’autres faits tout aussi intéressants par eux-mêmes, mais sans doute moins passionnants pour certain public avide de scandales.

Les journaux se sont bornés à une simple mention sans commentaires d’une décision prise il y a quelques aemaines par le Chapitre général du couvent du St-Bernard au sujet de l’envoi éventuel de chanoines de la Congrégation dane les lointains et montagneux parages du Thibet afin de créer sur les hauts cols de la chaîne de l’Himalaya des établissements hospitaliers dans le genre des “vénérables” institutions ohariitables du Grand St-Bernard et du Simplon qui, avec le développement des moyens de circulation rapide et l’évolution des conditions économiques modernes, ont à peu près fait leur temps.

Ceux de nes concitoyens qui ont une noble soif de dévoilement et de sacrifices à l’égerd de leur prochain souffrant, ceux qui renoncent au monde et revêtent l’habit ecclésiastique pour mieux se vouer à leur vocation sublime, seraient-ils dans l’obligation d’aller si loin, au centre de l’Asie jaune, en un paye inconnu où dee milliers (le moines ou lamas peuplent déjà d’innombrablee convents), pour trouver des misères à soulager et pour faire la charité à de pauvres hères abandonnés ?

Au lieu d’acquiescer au préavis, st convaincant fût-il, des chanoines Coquoz et Melly revenus de leur voyage d’exploration là-bas, fort décidés de repartir avec des confrères, ces derniers n’ont-ils pas songé qu’ils auraient encore une plus belle mission à remplir au milieu de leurs compatriotes» et sans même sortir du Valais ?

L’hospice du Grand St-Bernard, comme plus tard celui du Simplon, a rempli à travers les idéales un rôle bienfaisant qui fut de toute beauté. Bénie soit la mémoire des saints personnages qui ont fondé à l’âge de fer de la barbarie européenne des institutions qui furent des refuges providentiele où les pauvres voyageurs perdus dans la tourmente trouvaieeit le salut comme aujourd’hui ceux qui en parcourant les brillants déserts africains atteignent exténués la verdoyante oasis.

Mais aujourd’hui le rôle” charitable du St Bernard est à peu près ,achevé, comme est finie l’ère des longs pèlerinages à pied. Ceux qui en ont les moyens montent là-haut en automobile. Les ouvriers d’outre mont qui doivent franchir la frontière en toute saison le font plus vite et à moins de frais en traversant le Simplon en chemin de fer, même s’ils spéculent sur le gîte et la pitance que peuvent offrir les bous pères grâce aux immenses richesses octroyées à l’antique monastère par la munificence des puissants de jadis. Et que de faux pauvres qui ont exploité une charité trop confiante aveuglément distribuée I

Ces temps sont révolus. L’hospitalisation des passants au Mont-Joux n’a plus un caractère de charité. Il y a là-hautt pour les voyageurs un hôtel en été. Quant à la saison d’hiver, qui est contraint de parcourir ces hautes solitudes doit avoir les moyens de se ravitailler.

Un séjour hivernal au milieu des neiges au Grand St-Bernard ne se justifierait guère que dans un but de recherches et d’observations scientifiques (météorologie, etc.). Passer l’hiver à cette altitude est inconfortable, malsain et d’une utilité fort centestable. Les chanoines d’un certain âge supportent difficilement l’âpre climat de la montagne. N’a-t-il pas déjà été question d’abandonner le St-Bernard en hiver et d’installer ses habitants dans un site plus clément, à Ecône, par exemple ?

Ce n’est pas au Thibet ou dans quelque autre paya d’outre-mer, dans un quelconque “Monomo¬tapa perdu”, que les Moines de la montagne doivent transporter une bienfaisante activité qui a de moins en moins sa raison d’être là où elle s’est déployée depuis un millénaire. Charité bien entendue  commence par soi-même et par les siens. L’ceuvre de saint Bernard de Menthon ne resterait-elle pas dana la tradition fixée par son magnanime fondateur en s’intéressant aujourd’hui, que les pèlerine du siècle n’ont plus guère recoure à elle, aux vieillards, aux orphelins, à tous les malheureux abandonnés dans le rayon du couvent des “deux dites” des Alpes, chez nous et au delà de la frontière ? Quelle oeuvre pie à accomplir. Quelle utile collaboration ce serait pour l’assurance-vieillesse officielle. Moines du St-Bernard, pensez, s. v. pl., aux grandes misères de chez nous.”

Article non signé paru dans le journal du Parti Radical Valaisan   “N’allez-pas au Thbel.?  “, in Le Confédéré N° 71, lundi 17 août 1931, p.1.

dmc le jour de la Saint Luc et des Saints Louis et Zélie Martin