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X. Préparatifs pour partir vers l’ouest, vers la Birmanie

Journal d’un catholique thibétain

Après avoir passé trois jours à Aben (1.), avec des résistants tibétains, nous partons pour Tchrana. A Tchrana, nous disons au roitelet Adji: «En quittant notre pays, notre but premier était d’aller en Birmanie. Il y a quelques temps, nous avons entendu dire que le Père L. Emery, qui a vécu plusieurs années chez nous, a passé par la Birmanie, à Putao. Maintenant, nous désirons aller le trouver. Adji nous répond: «Les deux plus âgés (Zacharie et Léon) peuvent partir! Les plus jeunes, vous restez ici!»

Je (Zacharie) réponds: «Excusez-moi! Le chemin vers la Birmanie et les ponts sont en mauvais état. De plus, actuellement, là-bas, il fait très chaud. A notre âge, nous deux, nous ne pouvons plus y aller tout seul. Permettez, je vous en prie, aux quatre plus jeunes de nous accompagner!»

Une lettre de demande d’aide au gouvernement chinois de Taiwan

Adji dit alors: «Puisqu’il en est ainsi, je vais écrire une lettre de demande d’aide à l’intention du chef de Taiwan, Tchang Kai-chek. Si je vous envoie tous en Birmanie, auriez-vous la possibilité de faire parvenir cette lettre à Taiwan?»

Kioutses en Birmanie

Je lui réponds: «Si nous parvenons jusqu’en Birmanie, nous rencontrerons des Pères (2.) et, c’est certain, nous aurons la possibilité d’envoyer cette lettre à Taiwan.»

Adji est satisfait de notre proposition. Après avoir discuté avec Wongdien, le roitelet de Kanggong, ils rédigent la lettre de demande d’aide adressée au gouvernement chinois de Taiwan.

Discussion sur les armes

En nous remettant la lettre à destination de Taiwan, Adji nous donne un cheval, du thé, du beurre, du sel et tout ce qui nous est nécessaire pour le voyage. Puis, il nous dit: «Les fusils de chasse, vous pouvez tous les emporter! Le fusil au chargeur à dix-sept coups et le pistolet au chargeur en roulette, vous les laissez ici! A l’avenir, si votre Père peut revenir chez vous, je le lui dédommagerai selon le prix courant (3.).»

A la fin de cet échange et après avoir insisté sur le fait que Adji devra payer les armes, nous les lui donnons. Adji nous passe alors la lettre de demande d’aide militaire et nous dit: «J’espère que vous parviendrez à remettre cette lettre au gouvernement de Taiwan. A l’avenir, je vous donnerai une belle récompense.» Sur ce, il nous quitte et monte vers Kaibo et Ouabu.

Quant à nous, nous nous disposons à partir vers la Birmanie. Parce que sur les montagnes que nous devons franchir, il y a encore beaucoup de neige, nous restons encore une vingtaine de jours à Tchrana avant de nous mettre en route.


  1. Vers l954–l955, les tibétains de Aben, sous la conduite de Ngebo, se révoltèrent. Ils expulsèrent les soldats communistes du Tsarong et brûlèrent les bâtiments officiels. Le Tsarong désigne la vallée du Salouen en territoire tibétain et celle de son principal affluent tibétain, la rivière Eulkio, – Yuquhe. A deux reprises, les communistes essayèrent de reprendre le contrôle du Tsarong, mais ils furent repoussés par Ngebo et ses hommes, quarante combattants environ. Vers l956-l957, le roitelet de Yaogong, Adji, – Jirusong -, et le roitelet de Kanggong, Wongdien, – Songshulin -, se révoltèrent également. Les roitelets de Yaogong et de Kanggong résidaient au sud et au nord de Deqin, – Atundze. Le roitelet de Yaogong contrôlait le bassin du Mékon au sud de Deqin, jusqu’à Cizhong, – Tsechung -, et Batong. Après la prise du pouvoir par les communistes, Adji a été nommé sous-préfet du district de Deqin. Le roitelet de Kanggong avait autorité sur les habitants du bassin du Mékon, au nord de Deqin, jusqu’à la frontière du Tibet. Ne pouvant tenir face à la pression de l’armée rouge, Wongdien, Adji et leurs combattants, – deux à trois milles hommes -, franchirent la chaîne de montages Kawagarbo et se réfugièrent dans le Tsarong. En l959, durant la prise du Tsarong par l’armée rouge, Ngebo et Wongdien furent tués. Adji fut fait prisonnier et condamné aux camps de rééducation (ces renseignements sont fondés sur les dires de Joseph).
  2. Au printemps 1955, le Père L. Emery a visité le nord de la Birmanie et a réussi à contacter quelques catholiques de Gongshan qui s’étaient établis en Birmanie.
  3. Le Père André avait prit part à la première guerre mondiale et avait apporté avec lui ces deux armes comme souvenirs.
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