Skip to main content

XVII. Léon et Andréa se rendent à Myitkyina

Quelques jours plus tard, je tombe malade : j’ai mal à la tête, je vomis, je ne peux plus manger. Un officier vient m’examiner ; il demande à un soldat de me conduire à l’hôpital. Après quatre à cinq jours d’hôpital, je ne suis pas encore guéri. A ce moment, un officier dit à Léon et à Andréa : « J’ai reçu un ordre venant d’en haut. Demain ou après-demain, vous devez partir pour Myitkyina. Nous ne savons pas quand votre compagnon sera guéri. Vous ne pouvez pas rester ici à l’attendre. » Ainsi, les deux partent pour Myitkyina, accompagnés de trois ou quatre soldats.

Les jours suivants, je suis toujours malade et rumine sans cesse la même inquiétude : « Les soldats birmans vont certainement nous remettre entre les mains des communistes chinois. » Je n’ai plus le moral. Parfois, j’essaye de me reprendre et de rester calme, espérant qu’ils ne nous livreront pas aux communistes. Je prie le Seigneur et la Vierge Marie de nous protéger. Dans mes moments d’accalmie, j’écris une lettre pour la faire parvenir aux Pères, au cas où l’occasion se présenterait.

Grâce à la miséricorde de Dieu et à l’aide de Marie, et sans que je m’y attende, un jour, l’oncle d’Andréa, Djonglong (Djonglong, le nom signifie mendiant en tibétain, avait un goitre. Une dizaine d’années plus tôt, il partit en Birmanie pour essayer de trouver des médecins capables de le guérir. Les Loutze du district de Kongshan n’aimaient pas se rendre à Dali, car il y avait trop de brigands entre Weisi et Dali. Ils commerçaient plus volontiers avec les populations de la Birmanie.), vient à l’hôpital chercher des médicaments. Nous sommes très heureux de nous rencontrer. Djonglong me dit : « J’ai entendu dire que vous étiez ici. Avant-hier, j’ai voulu venir vous rendre visite. En cours de route, j’ai rencontré une personne qui m’a dit que vous étiez déjà partis pour Myitkyina et je suis rentré chez moi. »

Je lui réponds : « Nous espérions te rencontrer, mais nos gardiens nous ont enfermé dans le camp militaire. Comme ils ne nous laissaient pas sortir, nous n’avons pas pu aller te trouver. Ces jours passés, Léon et Andréa sont partis pour Myitkyina, mais moi, comme je suis malade, je ne peux pas me déplacer et je suis resté ici. Chaque jour j’espérais que tu viennes me trouver. Par un heureux hasard, aujourd’hui je t’ai rencontré. J’ai écris une lettre et j’espère que tu parviennes à la remettre à l’un des Pères qui autrefois étaient chez nous. »

Avec enthousiasme, il me dit : « Il y a deux à trois ans, j’ai rencontré le Père L. Emery. Son plus grand désir était d’avoir des nouvelles concernant les catholiques tibétains. Il a remis une lettre à Adjrou (Adjrou était le deuxième fils du chef des villages de Dalla.

BERNARD MARIE (ADJROU EN NAXI), UN PRÊTRE DU SICHUAN ET MARTA A DALI EN 1998

Au village de Caidang vivait une belle jeune fille prénommée Ada,-Magdalena-. A Bahang, dans une famille aisée vivait un fils unique prénommé Joseph qui était un peu faible d’esprit et de corps. Les parents firent tout leur possible pour qu’ils se marient ensemble, mais Ada refusait toujours. Finalement les parents obligèrent Ada à épouser Joseph. Le Père de Bahang bénit ce mariage. Après le mariage, Ada s’enfuit. Elle connut Adjrou et ils s’aimèrent. Ils décidèrent de se marier, mais par peur de représailles de la part de la famille de Joseph, ils partirent vivre en Birmanie. En l956, lors de son voyage en Birmanie, le Père L. Emery les rencontra. Après avoir pris connaissance de leur situation, le Père L. Emery demanda à Ada de certifier sous serment qu’elle avait réellement été forcée à épouser Joseph. Ensuite il bénit leur union.) et à moi-même, en nous priant de la faire parvenir aux catholiques de Bahang.

De plus, il nous a demandé de nous renseigner minutieusement sur l’état de chaque communauté catholique de chez nous. Avec Adjrou, nous avons décidé d’apporter personnellement cette lettre à Bahang. En chemin, nous rencontrèrent de nombreux Lissou (Les Loutze constituent l’ethnie la plus répandue le long de la frontière sino-birmane, au nord de Baoshan et de Myitkyina) qui fuyaient depuis le district de Kongshan. Ils nous conseillaient de ne pas aller dans la vallée du Salouen, car les communistes organisaient partout des jugements populaires et emprisonnaient beaucoup de personnes. Ainsi, nous n’avons pas osé nous rendre à Bahang et nous sommes retournés sur nos pas. Actuellement, cette lettre est encore dans les mains d’Adjrou.

Ces jours-ci, il est parti pour Sumprabum. A l’avenir, si tu le rencontres, tu pourras prendre connaissance du contenu de cette missive. De plus, le Père Emery a rencontré le pasteur anglais qui réside à Sumprabum. Ce dernier lui a dit que, à l’avenir, si quelqu’un désirait envoyer une lettre au Père Emery, il serait heureux de la lui faire parvenir. Tu as écris une lettre, tu n’as qu’à me la donner ; je la remettrai à ce pasteur. »

Le cœur soulagé, je lui remets la lettre que j’ai écrite et lui demande de faire en sorte que ma lettre soit envoyée au Père L. Emery. Après avoir pris ma lettre, il s’en retourne chez lui.